Que sera demain ?

Que sera demain ? Oeuvre de Charles Carson, sculpture représentation d’aujourd’hui

Que sera demain ???

Si les poissons pouvaient pleurer, ils rempliraient les océans de larmes !

La Terre est une planète rare et peut-être unique dans l’univers car elle offre le privilège de porter la vie. Malheureusement tout le monde n’a pas conscience de la précarité de son existence.
Celle qu’on surnomme la « planète bleue » porte bien son nom : 70.8% de la surface de la Terre sont couverts par les océans. Ils représentent une surface de 361 millions de km2 et une volume de 1.37 milliards de km3. Ils contiennent 97% des réserves d’eau de la planète et 80% de la biodiversité, soit entre 4 et 80 millions d’espèces différentes, bref des milliards de fois la population humaine.
Bien que la mer constitue une source de nourriture pour des centaines de millions d’hommes, à peine 0.01% des océans est protégé contre les activités humaines souvent destructrices. Dans ces conditions il n’est pas étonnant qu’aujourd’hui la mer soit polluée et que ses habitants disparaissent à force d’être chassés ou de perdre leur habitat. Depuis quelques décennies pourtant les scientifiques épaulés par des journalistes, des photographes et des écologistes nous demandent à tous de protéger cette ressource essentielle à notre survie.
Mais à force d’ignorer leurs conseils et leurs recommendations, aujourd’hui tous les acteurs économiques vivant de la mer sont touchés par cette insouciance : à force de piller les océans et d’y déverser nos déchets sans retenue, le milieu marin (côtier ou hauturier) s’est appauvrit, il se dépeuple des espèces les plus communes et de leurs prédateurs et l’eau comme les fonds sont définitivement pollués. Si les poissons pouvaient pleurer, ils rempliraient les océans de larmes !

Que sera demain ? Oeuvre de Charles Carson, sculpture représentation de demain

Devant l’augmentation des accidents maritimes, du manque de scrupules des armateurs comme des industriels polluant la mer sans vergogne, des associations telles que Greenpeace ainsi que des fondations se sont mobilisées pour sensibiliser le monde politique et la population sur l’état de santé de la mer. Devant le laisser-aller général et le laxisme des autorités chargées de la protection de l’environnement notamment, nous sommes arrivés à une époque critique où nous devons trouver des moyens radicaux pour protéger la mer de la convoitise et de l’insouciance des hommes.
Si nous ne protégeons pas cette ressource, dans un quart d’heure une espèce aura disparu. Demain la mer sera un dépotoir nauséabond et ses rares habitants seront stériles ou devenus les vecteurs des pires maladies.
Si nous voulons préserver la biodiversité marine, la santé de la chaîne alimentaire, continuer à manger du poisson, à observer les couleurs du corail ou les baleines s’ébattre en pleine mer, nous devons changer nos habitudes : sensibiliser la population à la fragillité de cet écosystème et édicter de nouvelles lois plus répressives afin d’arrêter les activités de tous ceux qui considèrent la mer comme un dépotoir ou une réserve inépuisable de nourriture.
Car la mer vit et a besoin de conditions propices comme de temps pour assurer son équilibre et indirectement notre survie. Or les activités humaines pèsent de plus en plus lourd dans cette balance et menacent à terme la survie de cet environnement.
Si nous voulons agir dans le sens du développement durable nous devons limiter notre impact sur ce biotope et veiller à préserver l’équilibre des océans. Pour cela les paroles et les bonnes intentions ne suffisent pas; nous devons nous donner les moyens d’atteindre notre objectif.

Signe de l’impact négatif des hommes sur la nature. Cette carcasse d’albatros échouée sur l’atoll de Kure au large de la Californie révèle que cet oiseau a avalé des boîtes en plastique qu’il prit pour des poissons… Comme sur nos rivages, en raison du sens des courants océaniques, la mer rejette des centaines de kilos de détritus dans cette région du Pacifique. Document Mindfully

Ce que dit la loi
Sur le plan légal, en 1972 les nations ont signé un traité sur la prévention de la pollution des mers. Mais cela n’a pas empêché les grandes nations de polluer les mers plus qu’à leur tour. Cette activité commença après la guerre (~1950) où les Etats-Unis, le Royaume-Uni et la France notamment ont rejeté en haute mer des déchets chimiques ou radioactifs, des détritus en plastique, des munitions, y compris des épaves (navires, sous-marins, avions) non dépolluées.
Rappelez-vous ces milliers de fûts contenant des déchets nucléaires (enrobés dans du bitume ou du ciment) jetés dans les hauts-fonds de l’Atlantique par le Royaume-Uni. Plusieurs décennies plus tard Greenpeace en a retrouvé; ils étaient perdus, corrodés et finiront un jour par libérer leur matière radioactive dans l’océan.
Jusqu’en 1963 la France profita du flou juridique pour se délester de ses fûts toxiques par petits fonds ainsi que dans la Fosse des Casquets au large de la pointe de La Hague. Les Etats-Unis et la Russie en firent tout autant dans leurs eaux côtières.
Il fallut que les écologistes se manifestent, nous apportant des preuves accablantes de ces actions peu recommandables et alertent les médias durant près de dix ans pour que finalement, sous la pression les gouvernements reconnaissent l’insouciance de leur attitude.
En 1972, 42 pays adoptèrent la Convention de Londres interdisant le rejet de déchets nucléaires en mer et des règles strictes concernant les autres déchets. Le texte entra en vigueur en 1975 et porte ses effets jusqu’en 2018. Cette convention est renouvelable tous les 25 ans. Seul inconvénient, seuls 15 pays ont signé la convention.
L’annexe I de cette convention dresse la liste toutes les substances dont le déversement est interdit (déchets radioactifs, mercure, cadmium, etc, tandis que l’annexe II dresse la liste des substances dont le déversement peut être autorisé par permis (déchets contenant de l’arsenic, du nickel, des pesticides, etc.). Toutes les autres substances peuvent être déversées dans les océans.
Entre-temps la Convention de 1992 pour la protection du milieu marin de l’Atlantique du Nord-Est (OSPAR) fut adoptée en Europe. Son rôle vise à protéger et conserver la biodiversité marine et les écosystèmes, surveiller l’eutrophisation, les substances dangereuses ainsi que les actions délictuelles de l’industrie du pétrole et du gaz en offshore et de prévenir les pollutions de la zone maritime par des substances radioactives.

Rejet direct dans un fleuve des eaux usées non traitées, direction la mer.

Le 7 novembre 1996 les signataires de la Convention de Londres ont ajouté un protocole à leur convention imposant dorénavant que l’immersion des déchets en mer devait respecter le principe de précaution et celui de « pollueur-payeur ». La définition de la « mer » a également été amendée qui, jusqu’alors limitée aux eaux marines, est élargie et englobe désormais le sol et le sous-sol. Malheureusement… ce protocole n’est toujours pas ratifié par toutes les parties !
Ceci dit, pour la première fois, un traité interdit l’immersion de déchets ou de toute autre matière, l’incinération en mer, ainsi que toute exportation de déchets vers d’autres pays aux fins d’immersion ou d’incinération en mer. En d’autres termes, il est interdit d’utiliser la mer comme dépotoir et de la polluer. Le plus triste est qu’il fallut écrire ce principe écologique élémentaire dans une loi pour l’appliquer !
L’idée d’immerger profondément les déchets toxiques peut être considérée comme un « mal nécessaire » et la moins pire des solutions, si ce n’est qu’une fois sous l’eau, nous n’avons plus aucun contrôle sur les déchets : que les fûts s’éventrent et c’est une fuite radioactive incontrôlable qui contaminera la mer et ses habitants ainsi que les sols. Il fallait donc en terminer avec cette méthode aveugle et potentiellement dangereuse à terme.
Mais ce protocole a eu un effet négatif bien qu’il représente un grand pas en avant en matière d’écologie. En effet, pour éviter de contaminer la mer, quelques années avant la conclusion du protocole les scientifiques avaient envisagé d’immerger les déchets toxiques près des zones de subduction. L’image était très bonne : en quelques milliers d’années les déchets seraient entraînés dans la croûte terrestre et dissous, problème résolu. Une alternative consistait à les enfouir dans des puits forés à grande profondeur. Ces deux solutions ont dû été abandonnées suite à la nouvelle législation internationale qui mis fin à ces études. Aujourd’hui on peut donc considérer que les fonds marins ne serviront plus au stockage des déchets et ne serviront donc plus de dépotoir, sauf accident. Les plongeurs comme les poissons vous en remercient.
Un océan de désolation
Mais est-ce pour autant que la mer a retrouvé sa santé ? Certainement pas. Dans l’un de ses sketches présenté en 2003, l’humoriste français Dany Boon expliquait qu’étant habitué à la couleur brune ou grise de la mer du Nord de son pays « chi » (eau naturellement troublée par l’agitation du sable), la première fois qu’il vit la Méditerranée il croyait qu’on y avait déversé du « Canard WC ». Berk ! On peut en rire mais il n’est pas très loin de la vérité quand on apprend comment que les armateurs considèrent l’eau de mer : un produit bon à laver les cales de leurs pétroliers quand ils n’y déversent pas leur nappes de pétrole ! Or le lavage des cales en pleine mer pollue dix fois plus que les marées noires.
La mer ne retrouvera pas sa santé tant que le risque de pollution lié aux activités humaines et notamment aux activités industrielles, à la culture intensive et au tourisme subsisteront. A côté des armateurs peu scrupuleux qui souillent nos plages de pétrole, des agriculteurs qui rejettent leurs eaux souillées sans traitement ou ceux qui la polluent avec des déchets manufacturés ou d’incinération, les stations d’épurations sont également dans le collimateur des écologistes alors qu’elles veillent soi-disant à la pureté des eaux rejetées dans la nature.

Le MV Sirius de Greenpeace et des pêcheurs danois manifestent en mer du Nord contre la pollution générée par le bateau d’incinération en mer Vesta. Documents Mother Jones et Greenpeace.

En effet, nous savons bien qu’en période estivale, avec les centaines de milliers de touristes qui se rassemblent dans nos villes côtières, la baignade est parfois interdite le long de nos rivages suite à la prolifération des microbes ou la pollution d’un estuaire. Dans quelques années ces installations devront être agrandies ou dédoublées pour contenir le flôt toujours plus important d’eaux usées. Mais ceci ne représente que la partie visible de l’iceberg. Car sous l’iceberg se cache une autre pollution.
Un dépotoir sous-marin
Depuis que l’homme n’a plus peur de l’eau et ose s’aventurer loin des rivages et affronter la haute mer, à titre privé ou professionnel, il pollue la mer sans vergogne. Les plongeurs connaissent très bien ces images : des tortues de mer sont retrouvées asphyxiées après avoir pris des sachets en plastique pour des méduses, des phoques, des dauphins, des poissons-lunes et des requins meurent noyés emprisonnés dans des filets de pêche ou des cables abandonnés et des pieuvres élisent domicile dans des bouteilles.
Plus loin, à moitié enfouis dans le sable des herbiers d’Atlantique ou de Méditerranée, ceux des Caraïbes, d’Indonésie ou d’ailleurs nous retrouvons les échantillons les plus divers de notre civilisation, bouteilles vides, ustenciles domestiques, voitures, pneus, etc. La plupart de ces macrodéchets ont été volontairement rejetés en mer sans scrupule depuis les années ’80. D’autres y sont arrivés au gré des courants marins et s’accumulent dans les dépressions, formant localement d’immenses dépotoires sous-marins à faire hurler non seulement les écologistes mais également les touristes et les pêcheurs. Bref, toute la société est concernée par cette pollution et nous en sommes tous responsables.
Selon les sites, ces macrodéchets sont constitués de 60 à 95% de plastiques d’emballages y compris de bouteilles. Viennent ensuite les objets en verre (bouteilles, flacons), en métal (canettes de boissons, épaves), les tissus en enfin les objets en cuir ou en caoutchouc.
Plus étonnant, l’Ifremer a répertorié dans le golfe de Gascogne 15 débris/hectare à 1800 mètres de profondeur et plus de 100 débris/hectare en Méditerranée à 1000 mètres de profondeur !
Ainsi que nous l’évoquions, les densités maximales se rencontrent près des grandes villes méditerranéennes où elles peuvent être supérieures à 1500 débris/hectare à Marseille et au Cap Ferrat. Mais le large est également contaminé puisqu’on dénombre 500 déchets/hectare dans le lit profond du Rhône, à 2000 mètres de profondeur. Selon les résultats de la campagne Victor Première (août 1998) de nombreux débris existent encore très au large, à des profondeurs supérieures à 2000 m !
Du fait de cette pollution omniprésente, une étude française a révélé qu’aujourd’hui entre 200 et 700 l/j/km de macrodéchets s’échouent sur nos rivages ! Chaque année cela représente des milliers de tonnes de détritus qui transforment nos rivages en véritables dépotoirs ! La situation est identique dans toutes les eaux du monde, y compris dans les atolls du Pacifique qui deviennent des décharges à ciel ouvert. Décidément, l’homme semble prédestiné à polluer tout ce qu’il touche !

Suite voir : http://www.astrosurf.com/luxorion/mer-depotoir-refuge.htm